Honorable Honoré Mercier, le père et le fils

L’Honorable Honoré Mercier l (1840-1894)

Honoré Mercier descend d’une famille percheronne originaire de Tourouvre dont l’ancêtre, Julien Mercier, s’établit à Québec en 1647. De père en fils, les Mercier ont cultivé la terre.

À quatorze ans, il entre au collège des Jésuites de Montréal. En six ans, les bons pères lui inculquent l’horreur de la médiocrité, le goût du travail acharné et une excellente culture classique,

Honoré Mercier n’a rien vu de la révolte des Patriotes, mais son père la lui a souvent racontée avec émotion et enthousiasme  comme le plus grand idéal d’une vie d’homme : se battre pour l’émancipation de son peuple, même contre l’Église s’il le faut.

En 1862, Honoré Mercier est journaliste et résolument conservateur. Il dénonce les manœuvres des Libéraux alliés aux protestants fanatiques du Haut-Canada. Cependant, dès 1864, il prend parti ouvertement contre le projet conservateur d’une Confédération : il est persuadé que le fonctionnement des nouvelles institutions se fera au profit du pouvoir fédéral, où le Canada français est minoritaire.

Cette année-là, il s’éloigne de la politique et se rend à Montréal pour poursuivre des études en droit tout en continuant de travailler comme journaliste. Il est reçu au barreau en 1865.

En 1866, il s’insurge contre le gouvernement conservateur d’Ottawa de Georges-Étienne Cartier qui crée selon lui un précédent dangereux pour l’autonomie des futures provinces en s’en remettant à Londres pour régler un différend sur les écoles catholiques acadiennes au Nouveau-Brunswick. Il quitte le Parti conservateur et le Journal de Saint-Hyacinthe.

Le 29 mai 1866, Mercier se marie dans la cathédrale de Saint-Hyacinthe avec Léopoldine Boivin. Un premier enfant, Élisa, naît en 1867. Bonheur familial de courte durée : Léopoldine, dont la santé a toujours été fragile, meurt le 16 septembre 1869. Mercier se réfugie alors dans le travail et s’active dans la vie publique.   Il rencontre Virginie Saint-Denis, de 13 ans sa cadette, la belle-sœur de son ami. Une idylle se noue, et Mercier convole en secondes noces le 9 mai 1871. Il retrouve  graduellement  sa joie de vivre et son goût pour une grande aventure politique. Des enfants naissent dont Honoré le 20 mars 1875.

En 1870, la première révolte des Métis éclate dans l’Ouest. Le gouvernement fédéral qui vient d’acquérir ces immenses territoires, ne tient aucun compte des droits des premiers occupants en grande majorité catholiques et francophones. Or, comme le gouvernement est conservateur, les Libéraux épousent la cause des Métis… et Mercier s’enflamme à leurs côtés.

Comme la carrière d’avocat est à l’époque la voie la plus directe qui mène à la carrière politique, Honoré Mercier, journaliste et avocat, devient homme politique. Mercier est un orateur éloquent. Il peut argumenter en phrases courtes et sait se baser sur des faits et des chiffres. Il peut convaincre. Son style est  remarquable. Mercier est proche des petites gens et sensible aux frustrations nationales, Il est un travailleur acharné et d’une rare efficacité d’exécution.

 La vie politique d’Honoré Mercier est tumultueuse et parsemée d’embuches. En toile de fond, des batailles féroces entre conservateurs et libéraux.

Membre du Parti libéral, il aide à fonder en 1872 le Parti national, dans une tentative d’obtenir un appui électoral en dissociant les libéraux.

Le nouveau parti  ne dispose d’aucune organisation et siège parmi les libéraux sous le leadership d’Alexander Mackenzie. Celui-ci n’inclut aucun membre du parti national lors des élections de 1874. Mercier se voit écarté. Il n’insiste pas. Déçu et conscient qu’il n’y a guère de place en politique pour les esprits indépendants, Mercier se réfugie dans la pratique du droit et concentre son affection sur sa famille.

À l’été 1878, Mercier, qui cultive l’ambition de retourner à Ottawa, se présente aux élections générales comme candidat à Saint-Hyacinthe. Battu par ses opposants conservateurs, Honoré Mercier décide alors de réorienter sa carrière politique vers l’arène provinciale.

En 1879, Mercier est nommé solliciteur général dans le gouvernement libéral provincial de Joly de Lotbinière et est élu dans Saint-Hyacinthe. Cependant, le gouvernement libéral tombe en octobre et c’est Chapleau qui forme le nouveau cabinet conservateur. Chapleau se désintéresse du plan de colonisation du Manitoba par des Canadiens français et perd une occasion de maintenir l’Ouest francophone et catholique.

Le parti conservateur et le parti libéral se déchirent. Mercier cultive alors encore le projet d’un parti qui permettrait la coalition des libéraux et des conservateurs au nom de l’intérêt des Canadiens français. Le projet n’aboutit pas. Mercier retourne à la pratique du droit.

En 1883, Honoré Mercier remplace Henri-Gustave Joly comme chef du Parti libéral provincial. Devenu chef de l’opposition, Mercier est décrit comme un bourreau de travail. Il fonde le journal Le Temps, afin de soutenir le parti libéral dans l’arène médiatique, considérant alors que le journal libéral La Patrie, fondé par Honoré Beaugrand, est trop radical.

Lors du deuxième soulèvement des métis au printemps de 1885, une vague de solidarité  traverse alors le Québec parmi les catholiques et francophones. Honoré Mercier s’oppose fortement à l’exécution de Louis Riel. L’exécution de Louis Riel, le 16 novembre 1885, permet à Mercier de gagner l’appui populaire.

C’est l’occasion pour lui de construire une coalition avec des conservateurs dissidents en vue de l’élection provinciale de 1886. Le Parti national fondé par Honoré Mercier désire réunir les conservateurs et les libéraux canadiens-français. Le « Parti national » y remporte une majorité de sièges. Par la suite, le nom de « Parti national » est abandonné et le parti reprend le nom de « parti Libéral ».

Les conservateurs minoritaires continuent à gouverner pendant quelques mois de plus, puis Mercier devient premier ministre du Québec en janvier 1887.

Mercier reprend les thèmes fondamentaux de l’idéologie élaborée par les élites rurales cléricales mais n’en demeure pas moins ouvert sur les réalités nouvelles issues du mouvement d’industrialisation et d’urbanisation.

Ses priorités sont: l’affirmation de l’autonomie des provinces, la décentralisation de l’administration provinciale, le maintien d’un système scolaire confessionnel tout en s’ouvrant à l’enseignement technique et professionnel, la garantie des droits des minorités, le redressement des finances publiques, des amendements à la législation sur les terres de la couronne dans un sens favorable aux colons, une meilleure réglementation sur les heures de travail et une réforme du système judiciaire. Des lois sont votées pour contrôler les conditions sanitaires et le travail des enfants dans les usines. Il nomme une commission sur les asiles d’aliénés, créé le Conseil d’hygiène et ouvre un bureau d’immigration à Montréal.

Honoré Mercier est d’ailleurs particulièrement actif dans la colonisation du territoire, notamment pour contrer l’exil des Canadiens français vers les États-Unis. Il favorise le commerce avec les États-Unis et le reste du Canada, principalement par le biais des chemins de fer.

En 1888, Mercier fait le point sur sa première année comme premier ministre, au cours de laquelle on a terminé la construction du chemin de fer de Québec et du lac Saint-Jean. Il a créé le ministère de la Colonisation et offert le poste de sous-ministre au curé Antoine Labelle, champion de la colonisation des Laurentides. Le premier ministre investit dans les chemins de fer afin d’ouvrir l’accès à des régions isolées, construit des ponts sur les rivières importantes, s’intéresse aux potentiels de l’hydroélectricité et offre du soutien financier aux agriculteurs.

Mercier s’attaque au pouvoir de taxer du gouvernement fédéral et à sa capacité de forcer les Québécois, par le billet de la conscription, à aller se battre dans de sanglantes et lointaines guerres qui ne nous concernent pas. Mercier convoque aussi la première conférence interprovinciale des premiers ministres depuis la Confédération. Il mène une lutte visant à forcer le gouvernement fédéral à reconnaître le principe de l’autonomie provinciale en matière de questions administratives et fiscales.

Il reproche également au gouvernement fédéral de ne pas assez appuyer financièrement le Québec et veut « assainir » les finances publiques de la province en augmentant les rentes sur les terres publiques et en imposant des droits sur la coupe du bois et des taxes sur les mines et les chemins de fer.

Honoré Mercier est réélu à l’élection du 17 juin 1890 avec une majorité accrue.

Mercier règle la question des Biens des Jésuites de même que les querelles entourant la création d’une université distincte à Montréal:  Le 30 avril 1891, il est anobli par le pape Léon XIII, qui lui confère le titre de comte romain, en reconnaissance de son rôle dans le règlement de la question des biens des jésuites au Québec et dans la fusion des deux facultés de médecine catholiques de Montréal en ce qui est aujourd’hui la Faculté de médecine de l’Université de Montréal.

À son retour le 18 juillet 1891, Mercier trouve un pays en pleine effervescence. Macdonald est mort. Des rumeurs de corruption dans l’entourage de Mercier s’intensifient. Il est accusé d’avoir octroyé des contrats publics à des amis du parti et d’avoir touché des pots-de-vin pour financer son luxueux train de vie et ses voyages à l’étranger. Le Parti conservateur s’empare alors du dossier, faisant pression pour qu’une enquête soit menée. Mercier se retrouve seul face à la puissante machine conservatrice, qui dispose de partisans dans l’appareil administratif et judiciaire du pays. Ils veulent abattre l’homme qui a sorti la province de Québec de son emprise. Il subit aussi à la hargne d’individus qu’il a bousculés.

Fin 1891, les manœuvres du grand organisateur du Parti libéral, Ernest Pacaud, autour du financement d’un projet de chemin de fer, font tomber le gouvernement Mercier: c’est le scandale de la Baie des Chaleurs. Mêlé au scandale, Mercier, qui ignore ce qui se trame contre lui, tarde à se défendre et se défend mal devant le lieutenant-gouverneur Auguste-Réal Angers limite l’action gouvernementale, puis il impose à Mercier la mise sur pied d’une commission royale d’enquête le 18 septembre 1891 et, sans attendre le rapport final de cette commission, le révoque comme premier ministre le 16 décembre 1891.

Pendant que le président de la commission royale rédige son rapport, les conservateurs déclenchent des élections. Ils forment aussitôt une autre commission chargée d’enquêter sur le gouvernement Mercier et publient, au jour le jour, des témoignages incriminants. Rendu public, le rapport du président précise qu’il n’y a pas eu de preuve de la fraude. Mercier est acquitté, l’enquête menée n’ayant pu prouver sa participation personnelle.

Le 8 mars 1892, au terme d’une campagne de salissage d’une rare violence, les conservateurs remportent le pouvoir.

La santé de Mercier se détériore  et sa carrière politique est terminée. De plus, Honoré Mercier, qui a vécu une vie fastueuse, doit faire face à ses créanciers : il est ruiné. Il déclare faillite en septembre 1892 et perd presque tous ses biens.

Il fait un retour à la pratique du droit et le 3 février 1893, Mercier retourne brièvement à la politique. Il retrouve un regain d’énergie et semble songer à un retour au pouvoir. Il cherche une cause et, de nouveau, l’Ouest canadien, où la bataille des écoles du Manitoba fait rage, la lui fournit. Cette croisade entraîne Mercier dans de nouvelles polémiques – on le soupçonne non sans raison de rêver à une république canadienne-française indépendante. Il se fait remarquer une dernière fois en prononçant un discours au parc Sohmer, où il critique l’Union et la Confédération, exprime ses convictions républicaines et les raisons pour lesquelles il souhaite un Canada indépendant où les provinces seront des États autonomes comme aux États-Unis

Sa santé ne cesse de se détériorer. Au début d’août, il quitte son étude pour s’aliter. On le transporte une quinzaine de jours plus tard à l’hôpital Notre-Dame, où il meurt le 30 octobre 1894.

 

Extraits de textes:  (Dictionnaire biographique du Canada Honoré Mercier)

Wikipedia – Honoré Mercier  

Dictionnaire biographique du Canada Honoré Mercier

                              La Renaissance catholoque – Honoré Mercier


Honorable Honoré Mercier ll    (1875-1937)

Honoré Mercier nait en 1875. Fils d’Honoré Mercier et de Virginie Saint-Denis.

Issu d’un milieu où la politique est omniprésente, il passe ses six premières années à Saint-Hyacinthe, avant que son père n’installe la famille à Montréal.

Le 21 avril 1903, il épouse Jeanne Fréchette, fille de l’écrivain et poète Louis Fréchette. Le couple aura au moins dix enfants.

Il sera avocat, homme politique et administrateur scolaire. En 1899, il obtient son diplôme en droit et devient membre du barreau en juillet 1900.

À l’instar de son père, Mercier s’est intéressé à la politique. Il est élu conseiller aux élections municipales de 1906 à Montréal. Mercier se préoccupe notamment de l’enfouissement des fils électriques et de la création d’une grande bibliothèque pour la métropole.

Mercier fut député à l’Assemblée législative et ministre des gouvernements Gouin et Taschereau

Le 4 juillet 1907, Mercier joue un rôle dans la création de l’École des hautes études commerciales de Montréal (HEC), établissement que vient de créer le premier ministre de la province de Québec, Lomer Gouin, qui est également son beau-frère.

Du 29 avril 1914 au 25 août 1919, Mercier occupera le poste de ministre de la Colonisation, des Mines et des Pêcheries.

Les idées de Mercier sont progressistes. Protection des oiseaux migrateurs, amélioration de la foresterie, l’agriculture et création de centrales hydroélectriques seront ses réalisations.

En 1916, il participe aux démarches menant à l’adoption de la « Convention between the U.S. and Great Britain (for Canada) for the protection of migratory birds”. En 1917, dans le Naturaliste canadien, il présente son département comme l’un des premiers à avoir promu, dès décembre 1913, la sauvegarde des oiseaux migrateurs. En mars 1919, malgré les sarcasmes de l’opposition, Mercier parraine et mène à l’adoption de la « loi réservant certains territoires de la province de Québec comme refuges des oiseaux ». Cette loi crée des zones protégées sur une partie de l’île Bonaventure, le rocher aux Oiseaux et le rocher Percé.

En 1918, Mercier voit à l’aménagement du parc national des Laurentides, à des fins de plaisance, et à la création de la Réserve de forêt, de chasse et de pêche dans la Gaspésie. Au début des années 1930, il tentera d’organiser un nouveau parc de conservation dans la région de la rivière des Outaouais, mais ce projet avortera avec l’arrivée du gouvernement de Maurice Duplessis.

Ministre des Terres et des Forêts le 25 août 1919, il cherche un modèle d’exploitation conforme à l’adage de son époque : Gouverner, c’est prévoir. Dans ses allocutions, Mercier promeut la protection des forêts. En 1920, à Roberval, il facilite l’élaboration de cartes aériennes des rivières et des forêts afin de mieux localiser les feux de forêt par la mise en place d’une station d’hydroplanes pour les pilotes-arpenteurs.

En 1922, il favorise le développement des connaissances sylvicoles, contribue à la fondation de l’École de gardes forestiers et à l’ouverture de l’école de papeterie des Trois-Rivières.

À l’occasion d’une mission canadienne en France sur les questions forestières en 1923, il publie un petit ouvrage intitulé « les Forêts et les Forces hydrauliques de la province de Québec . Il est question de l’importance d’exploiter les ressources, d’en faire l’inventaire et de les conserver. Dans d’autres écrits, il favorise le reboisement de la province et déplore les coupes abusives. Mercier fait la promotion de la formation en foresterie pour améliorer l’approvisionnement, la fabrication, la vente et l’utilisation du bois. Il créera en 1931 la Commission des produits forestiers de Québec.

Vers les années 1920, certaines connaissances en hydrologie et en foresterie commencent à influencer la gestion de la forêt publique ; c’est ainsi que Mercier remarque l’effet de la conservation des massifs boisés sur la régulation du régime des eaux. Il admet l’impact des activités humaines sur la nature.

En 1927, il fait la promotion du développement hydroélectrique de la province, souhaitant même la nationalisation de la ressource. Reconnaissant l’importance des chutes d’eau dans l’installation de centrales hydroélectriques, il est sensible aux impacts pour les cultivateurs  des inondations causées par les barrages. Il établit une loi fixant des indemnités aux personnes qui subissent des dommages lors d’inondations dues à un barrage hydroélectrique, tout en maintenant le droit de la centrale hydroélectrique à poursuivre ses opérations.

Mercier favorise, en 1933, la création de l’École d’agriculture de Sainte-Martine,

En 1927, il soutiendra le suffrage féminin. Il sera l’un des quatre ministres à appuyer le projet de loi en ce sens.

En 1934, afin de faire progresser les conditions des travailleurs dans les chantiers, il contribue à la mise sur pied de la Commission des opérations forestières.

Honoré Mercier a conjugué ses goûts pour la nature à son travail d’avocat et à ses responsabilités ministérielles. Quand le temps le permettait, il passait ses heures de loisir dans le secteur boisé du parc de la Montagne tremblante à Mont-Tremblant.

Il a apporté une contribution importante à la mise en place d’organisations visant la connaissance et la protection des ressources naturelles de sa province. Cette préoccupation s’inscrivait dans un mouvement qui est apparu en Amérique du Nord dans les années 1920 et 1930, et qui a suscité une prise de conscience des problèmes causés par leur gestion.

En juin 1936, Mercier quitte la vie politique et décède à 62 ans, le 19 juin 1937, à la suite d’une crise d’angine.

 

Source:: Dictionnaire biographique du Canada  

 

Honoré Mercier (petit-fils)

Son fils, également nommé Honoré Mercier (1908-1988), fut industriel et Industriel et directeur du bureau d’enregistrement de Châteauguay. Maire de Léry, une petite municipalité près de là, puis fut élu député libéral dans Châteauguay en 1944, puis défait par la suite à trois reprises..

Le gendre d’Honoré Mercier, Lomer Gouin, fut premier ministre du Québec.

Un autre de ses petits-fils, Gaspard Fauteux, fut député fédéral puis lieutenant-gouverneur du Québec.

Enfin, son arrière-arrière-petit-fils Thomas Mulcair fut ministre dans le gouvernement du Québec puis chef du Nouveau Parti démocratique du Canada.

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